Le 08 mars dernier, Louis BOUTRIN présentait son dernier livre, "L'Audace de changer. Un new-deal écologique pour la Martinique" (Scitep-Editions), à la Bibliothèque Schoelcher de Fort-de-France.
Il avait deux premiers lecteurs à ses côtés : Frédérique ADREA-LORDINOT dont on lira l'intervention ci-après et Raphaël CONFIANT...
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Remerciements à Louis BOUTRIN qui a choisi de mettre à l’honneur une femme à l’occasion de la journée symbolique du 8 mars.
Raisons pour lesquelles j’ai accepté la proposition de Louis BOUTRIN :
POURQUOI CET OUVRAGE ?
La Martinique, de par son insularité, est directement concernée par les désordres écologiques que ce soit le dérèglement climatique, l’épuisement des ressources énergétiques fossiles, le risque de pénurie alimentaire, de pénurie d’eau, la dégradation de notre environnement, la perte de biodiversité, l’invasion d’algues sargasses, les phénomènes de pollutions atmosphériques aux particules fines et gaz à effet de serre, sans compter le lourd tribut payé par la population martiniquaise après l’empoisonnement au Chlordécone (et autres pesticides).
Tout cela sur fond de crise identitaire et sociétale.
Face à cette situation, il nous faut réagir par un vrai sursaut collectif car c’est aussi la traduction d’une crise du modèle économique dominant basé sur une recherche absurde de profit démesuré sur un socle d’injustice, d’inégalités et de pauvreté.Nous n’avons donc pas d’autre alternative que d’opérer une vaste mutation à la fois culturelle, économique, sociale, éducative pour plus de responsabilité et solidarité à travers « un new deal écologique pour la Martinique »
A travers son ouvrage : l’AUDACE DE CHANGER, Louis BOUTRIN veut nous livrer son bilan après 5 années passées à la CTM, mais également sa vision d’un développement plus harmonieux, plus égalitaire, plus respectueux des hommes, femmes et richesses naturelles de ce pays. Somme toute, plus vertueux.
Son mot d’ordre : MARTINICANITE qu’il justifie par : Ni Assimilationnistes, Ni Autonomistes, Ni Indépendantistes, Ni Noiristes.
Désireux d’AUDACE, de plus de culture, d’éducation, de liberté, de conscience martiniquaise, il nous propose donc un NEW DEAL ECOLOGIQUE en présentant :
Après avoir fait le bilan :
Dans un livre-référence : « Alfred MARIE-JEANNE, une traversée verticale du siècle » paru en février 2015 (donc en début d’année 2015, bien avant les élections des 6 et 13 décembre 2015), Louis BOUTRIN et Raphaël CONFIANT ont analysé un certain nombre de points structurants de son action politique. Par cette démarche, LB démontre ainsi sa loyauté envers AMJ que l’on donnait perdant aux élections de la CTM.
A la page 31, l’auteur cite l’intervention suivante d’AMJ à l’Assemblée Nationale : « le statut ne crée pas mécaniquement le développement, mais il peut le prédéterminer ce d’autant qu’un statut obsolète constitue un obstacle majeur au développement ». Dans la stratégie du leader du MIM, la question statutaire n’est donc pas exclusivement une question juridique et politique. Elle est également un préalable au développement économique. Il n’hésite pas à reprendre le constat d’Aimé CESAIRE, le rapporteur de la loi d’assimilation, qui reconnaissait que « la départementalisation a mis le pays en assistance publique »,
Il évoque les causes des différentes crises sociétales que traverse la Martinique, qui sont la résultante d’une racialisation des rapports sociaux où l’ordre ethnique a fixé l’ordre social, et d’un manque d’anticipation, de solution concrète et réelles perspectives
Page 52 : première victime de ce préjugé de race qui sévit dans le monde du travail, singulièrement dans le secteur privé, cette génération des 10-15 ans de 2009 qui n’a d’autre choix que le chômage ou l’exil et qui aujourd’hui est au pied du mur.
En raison :
cette génération a décidé de se rebeller.
COMMENT SORTIR DE L’IMPASSE MEMORIELLE ?
Page 55 : L’auteur appelle à la réconciliation par la mise en place d’une Commission-Vérité-Réconciliation, pour passer des métaphores aux actes.
Et parce qu’il refuse de s’enfermer dans une impasse mémorielle, l’auteur nous convie dans une nouvelle démarche : la Réconciliation passant par une étape Vérité.
Vérité historique mais aussi vérité au quotidien car il est de plus en plus insupportable de vivre dans une société racialisée ou race et classe prédominent. Une société où le pouvoir économique est béké, les directeurs des services déconcentrés de l’ETAT, blancs, l’autorité judiciaire, elle aussi de couleur blanche.
PAGES 56-57 : Ainsi, Louis BOUTRIN s’appuie sur le modèle sud-africain et de nombreux exemples aboutis pour argumenter.
Que ce soient des politiques relatives au développement humain, à la performance économique, ou à la valorisation maîtrisée de nos ressources naturelles, se pose inlassablement la question de l’appropriation au plus près du territoire de ces compétences. L’articulation entre l’obligation d’efficience territoriale et la notion de subsidiarité, principe fondamental, met en questionnement le transfert du pouvoir décisionnel du centre vers la périphérie territoriale et se révèle incontournable dans le processus engagé pour mettre en œuvre nos politiques de développement durable.
La question du modèle économique se superpose donc à la question du modèle politique. C’est à ce niveau qu’intervient la nécessité d’une simplification et d’une adaptation.
Cette nécessaire évolution statutaire et institutionnelle se justifie également par :
D’où les propositions suivantes de Louis BOUTRIN :
Page 72 : tout en restant ancrées dans la République, ces Collectivités d’Outre-Mer ou Collectivités à statuts particuliers, pourraient jouir d’une décentralisation avancée, voire d’une véritable autonomie régionale.
De plus :
Il faut un plan territorial d’action publique (le plan d’Aménagement et de Développement Durable pour la Martinique PADDMA) au service d’un projet de société et d’une population, pierre angulaire d’une vision politique, qui répond à des enjeux tels que l’environnement terrestre et maritime, les transports publics, l’énergie, l’économie bleue, la gestion des déchets, l’économie circulaire, la préservation et la mise en valeur de notre biodiversité, l’habitat, le tourisme, l’emploi, la décentralisation administrative.
Restait plus qu’à trouver le cadre juridique et politique adéquat, et c’est ainsi que l’auteur s’inspire du modèle Corse, le PADDUC dont la procédure d’élaboration est simplifiée et beaucoup plus courte que celle du SAR (voir renvoi 46 en page 94) : PAGE 94 « l’ex Conseil Régional (2010-2015) présidé par un urbaniste de formation, avait retenu l’option d’une révision complète du SAR qui n’a pourtant pas abouti après 6 années de travail.
Ainsi, le PADDMA ne pourrait se limiter à sa seule dimension juridique. C’est avant tout l’expression d’une volonté politique de domicilier la responsabilité martiniquaise et de l’exercer à l’échelon de ceux qui sont directement concernés par cette action publique d’aménagement du territoire
Qu’il s’agisse des problématiques d’aménagement du littoral et d’appropriation de la Zone Economique Exclusive (ZEE), l’auteur met en exergue les difficultés nombreuses rencontrées en matière de transfert de compétences.
Ainsi, PAGE 105/106 : les politiques à mettre en œuvre passent nécessairement par la domiciliation d’un pouvoir normatif qui englobe certaines attributions internationales mais aussi les problématiques juridiques de surveillance et de police de l’environnement.
PAGE 105 : La Martinique ne peut renoncer aux richesses halieutiques et minières de ses fonds marins mais doit disposer d’outils juridiques lui permettant d’accompagner à la fois la transition énergétique, la nécessaire mutation des pratiques de pêche et le développement d’une économie bleue.
AUTRE PARTIE DU LIVRE QUI A EGALEMENT RETENU MON ATTENTION : Réservée aux réalisations de la CTM
S’agissant de la transition énergétique, Louis BOUTRIN nous invite à relever le défi de la transition écologique par notamment :
La Martinique a pris en main son avenir énergétique, avec conviction et détermination :
Enfin, afin d’assurer l’accès à l’eau pour tous les Martiniquais, toute l’année, dans des conditions de potabilité optimale et à un prix économiquement acceptable pour tous, il convient de faire le choix d’œuvrer pour une politique de gestion publique de l’eau sous le contrôle et la responsabilité des élus à travers une entité unique. Ce qui impose d’anticiper le moment du renouvellement des contrats d’affermage (voir pages 153 à 154 les conclusions de la Chambre Régionale des Comptes) et d’avoir recours, sur ces grandes questions essentielles d’ordre écologique, à des procédures de démocratie participative indispensables à l’enrichissement du débat public et à la compréhension de la population.
En guise de conclusion, l’auteur nous envoie le message suivant : AYONS l’AUDACE de CHANGER, pour répondre à cette exigence de rupture et de revendication de plus de responsabilité !
Marie-Frédérique Adréa-Lordinot
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